En date du 15 mai dernier, nous avons reçu le prix Reconnaissance jeunesse dans la catégorie « Éducation – intervenant » du Secrétariat à la jeunesse. Notre équipe est très heureuse et reconnaissante de la remise de ce prix.
Cependant, dans le contexte actuel du projet de loi 21, nous souhaitons susciter une réflexion sur le rôle des éducateur.rice.s, incluant notamment les entraîneur.euse.s et partager certaines de nos préoccupations dans la perspective d’un meilleur vivre-ensemble. Nous vous invitons donc à lire la lettre que nous avons envoyée au premier ministre à ce sujet.
Tous les commentaires seront les bienvenus.
Montréal, le 17 mai 2019
L’honorable François Legault Député de L’ Assomption Premier Ministre du Québec
Responsable des dossiers jeunesse
Objet: Remerciements et réflexions en lien avec le rôle de l’éducateur et le vivre ensemble
Monsieur le Premier Ministre,
Je vous écris tout d’abord afin de vous remercier pour le prix Reconnaissance jeunesse dans la catégorie « Éducation – intervenant» remis par le Secrétariat à la jeunesse. Je suis honoré de faire partie des lauréat.e.s 2019 et bien heureux de vous avoir rencontré à l’occasion de la cérémonie de remise de prix du 15 mai dernier. L’expression que vous avez utilisée cette semaine en m’interpellant – « Le coach des coachs ! » – ainsi que l’enthousiasme de M. Samuel Poulin, votre adjoint parlementaire au volet jeunesse, m’ont fait chaud au cœur.
Déjà membre de l’Ordre de l’excellence en éducation du Québec depuis 2018, je suis fier que le gouvernement du Québec reconnaisse une nouvelle fois la valeur de mes efforts, de mes talents et de mes idées en tant que fondateur de Pour 3 Points.
Cette reconnaissance se traduit aussi par un partenariat prometteur que Pour 3 Points entretient avec le ministère de !’Éducation et de l’Enseignement supérieur. Notre organisme œuvre à former les entraîneur.euse.s sportif.ve.s afin qu’elles et ils deviennent mieux préparé.e.s à intervenir auprès des jeunes dans une perspective de réussite éducative, au-delà du sport, et ce, particulièrement en milieux défavorisés.
Je souhaite de tout cœur que ce partenariat se poursuive et évolue pendant plusieurs années encore. Comme entrepreneur social, je porte l’ambition que des milliers de jeunes à travers le Québec bénéficient, par l’entremise de leur entraîneur.euse, de l’encadrement d’un adulte plus apte, prêt et motivé à soutenir leur réussite.
Je vous écris en mon nom personnel et en celui de Pour 3 Points. Étant donné que nous œuvrons en contexte éducatif dans une perspective d’égalité des chances, nous avons jugé pertinent de vous soumettre les quelques commentaires qui suivent, dans la foulée de la commission parlementaire au sujet du projet de loi 21 et des débats qui animent l’actualité.
L’objectif de cette lettre n’est pas d’exposer notre opinion sur la laïcité, l’interprétation du droit à l’égalité sur le plan juridique, ou bien encore sur la liberté de conscience et de religion. Nous souhaitons plutôt susciter votre réflexion sur le rôle des éducateur.rice.s, ce qui inclut de notre point de vue les enseignant.e.s, les entraîneur.euse.s et autres intervenant.e.s évoluants en milieu éducatif. Nous souhaitons aussi partager certaines de nos préoccupations dans la perspective d’un meilleur vivre-ensemble.
La Loi sur l’instruction publique prévoit que l’enseignant.e a notamment comme devoirs de « contribuer à la formation intellectuelle et au développement intégral de la personnalité de chaque élève», « d’agir d’une manière juste et impartiale dans ses relations avec ses élèves» et de« respecter le projet éducatif de l’école».
À notre avis, ces devoirs de l’enseignant.e, qui dépassent les connaissances techniques ou scientifiques, incombent à tout éducateur.rice. C’est pourquoi Pour 3 Points soutient le développement des entraîneur.euse.s sur le plan personnel, au-delà des apprentissages techniques, afin qu’elles et ils exercent avec la plus grande conscience possible leur jugement éthique et critique.
Le développement de la conscience d’un.e éducateur.rice implique notamment une plus grande capacité à observer et à poser un regard critique sur ses propres jugements, croyances et valeurs. C’est ainsi qu’elle ou il parvient à être à son meilleur dans son rôle auprès des jeunes. Les éducateur.rice.s moins ouvert.e.s à cette observation sont plus limité.e.s dans l’exercice de leur rôle. À l’inverse, une conscience accrue de leur personne favorise leur capacité à exercer leur rôle de façon plus juste et davantage en cohérence avec les normes du milieu éducatif. Autrement dit, la qualité d’un.e éducateur.rice repose d’abord sur ce qui se passe à l’intérieur de sa tête, de son cœur, de son corps.
De plus, nous nous inquiétons de l’impact de l’adoption du projet de loi 21 sur les éducateur.rice.s autres que les enseignant.e.s, lesquel.le.s ne sont pas visé.e.s par le projet de loi 21. Désormais, comment celles et ceux portant un signe religieux seront-elles et seront-ils perçu.e.s par le milieu éducatif et par la société? Puisqu’elles et ils exercent une influence importante auprès des jeunes, questionnera-t-on aussi, éventuellement, la légitimité de celles et ceux qui porteront un signe religieux?
Enfin, un autre enjeu qui nous préoccupe est celui de la stigmatisation des personnes de confession musulmane, filles, garçons, femmes et hommes. Ces dernières font partie des personnes auprès desquelles nous agissons. Nous les retrouvons parmi nos jeunes, leurs entraîneur.euse.s et leurs parents. Nous estimons qu’il est de notre devoir collectif de favoriser un climat préservant leur dignité, leur sécurité et leur intégrité.
En ce sens, nous croyons qu’il est nécessaire d’ouvrir un dialogue honnête, ouvert et bienveillant sur l’islam au Québec. À notre avis, un tel dialogue serait probablement inconfortable, mais est, à notre sens, nécessaire dans une perspective dans une perspective de vivre-ensemble.
Nous invitons également votre gouvernement à favoriser des initiatives qui permettraient à l’ensemble des citoyen.ne.s du Québec de mieux se connaître et s’apprécier les un.e.s les autres. Ces investissements augmenteraient non seulement l’épanouissement et l’engagement des citoyen.ne.s dans la société, mais nous permettrait de capitaliser en tant que société sur les talents de l’ensemble de notre population.
Nous avons fait le choix de vous écrire ces quelques commentaires, dans le respect, conscients du caractère délicat du sujet. Parce que l’expression de notre voix relève de notre devoir citoyen. Reconnaissants et heureux de vous côtoyer en contexte de célébrations, sachez que nous serons toujours intéressés et disponibles à dialoguer afin de construire ensemble le Québec que nous voulons.
Pour 3 Points contribue depuis plusieurs années à l’éducation des élèves québécois.e.s ainsi qu’à l’égalité pour toutes les citoyennes et tous les citoyens du Québec et nous sommes enthousiastes à l’idée de contribuer davantage aux côtés de notre gouvernement.
Veuillez agréer, Monsieur le Premier Ministre, l’expression de mes sentiments distingués.
Fabrice Vil
Fondateur et président Pour 3 Points
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